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Wednesday, November 8, 2023

Mise à jour économique ou politique? - La Tribune

Quand on met à jour un logiciel, la différence n’est pas toujours palpable. Pas inutile, non, mais la plupart du monde ne voit pas la différence. La présentation du ministre des Finances, Éric Girard, a un peu le même effet. La mise à jour a des mesures qui sont loin d’être inutiles, mais pour une bonne partie de la population, ça passera inaperçu.

Je vois déjà les commentaires soulignant que 1,8 milliard $ pour le logement, c’est loin d’être banal. C’est vrai que le montant ne l’est pas – même si la moitié vient d’Ottawa. Mais s’il y a bien une constante dans les annonces en logement, c’est que l’enveloppe budgétaire est une chose, la mise en place des programmes en est une autre.

Si l’ancien programme en logement, AccèsLogis, permettait en moyenne la construction de 1800 logements par année, le nouveau programme mis en place en 2022, le PHAQ, n’a abouti depuis que d’un seul chantier de 40 logements.

Le gouvernement a beau se défendre en disant que c’est un nouveau programme, que ça a pris de court les gens, que ça demande des ajustements, ça signifie tout de même qu’il a jeté un programme qui fonctionnait pour un nouveau qui n’était visiblement pas prêt. Avec le résultat que les sommes promises n’ont pas été dépensées.

Faire ça en pleine crise du logement, pas le meilleur timing, comme on dit.

Sans parler qu’il y a présentement plusieurs incertitudes et inquiétudes concernant le projet de loi de la ministre de l’Habitation, France-Élaine Duranceau, qui, jusqu’à maintenant, a plutôt confirmé que le gouvernement préférait encourager le privé plutôt que le logement social.

Même chose concernant les logements pour les personnes en situation d’itinérance. Oui, il faut bâtir du logement adapté pour cette population, mais adapté signifie aussi des milieux de vie où il y a des services adaptés, de l’accompagnement, des travailleuses sociales, du soutien pour les aider. Il faut aussi des sommes pour ça.

Étouffer la négociation

Derrière les annonces pour le logement, les changements climatiques ou le transport en commun, le ministre des Finances a aussi intégré, dans cette mise à jour économique, l’offre du gouvernement pour les employés et employées de l’État : 10,3% sur cinq ans avec un montant forfaitaire de 1000 $.

Un peu présomptueux. Mais tout ça sert surtout à appuyer l’argumentaire du gouvernement sur la « capacité de payer », « pas les moyens » et autres propos du genre.

Le ministre Éric Girard a même prévenu, attention, que si l’entente devait dépasser ce cadre, l’État devrait emprunter pour payer son personnel.

L’image est bonne. Ça fait un bel épouvantail. Emprunter pour payer du monde, ça ne fait pas « gros bon sens ». Sauf que ce n’est pas tout à fait comme ça que ça fonctionne.

Déjà, un déficit, ce n’est pas si dangereux pour un gouvernement – à preuve, il y en a depuis la pandémie. Puis ne relier un déficit qu’à un enjeu, c’est plutôt arbitraire (ou politique). On pourrait aussi dire que le gouvernement doit emprunter pour attirer l’usine à batteries à McMasterville. Ou à cause de la baisse d’impôts – et donc une baisse de revenus.

C’est lancé comme si le gouvernement n’avait absolument aucune marge de manœuvre. Si c’était le cas, ce serait plutôt irresponsable de la part du ministre.

S’il n’y avait vraiment aucune marge de manœuvre, ce serait plutôt incompétent de clore un budget en y intégrant une dépense qui n’est pas encore déterminée tout en dépensant ailleurs en même temps.

Évidemment que le gouvernement n’étalera pas sur la place publique sa marge de manœuvre.

Le gouvernement Legault fait face à une des plus fortes mobilisations syndicales des dernières années.

C’est sûr, aussi, que la négociation va représenter des dépenses supplémentaires, mais on ne peut pas réduire ça qu’à des dépenses, ce sont aussi des investissements.

Je vais dire une évidence : une entreprise sans employé ne fait pas de profits. C’est réducteur de voir le salaire seulement comme une dépense.

Combien coûte la pénurie de main-d’œuvre en santé? Combien coûte le recours aux agences privées? En temps supplémentaire obligatoire-pas-obligatoire-mais-obligatoire-quand-même?

Quel est l’impact de la pénurie d’enseignants et d’enseignantes vécue en début d’année? L’exode des jeunes profs qui fuient le métier après quelques années?

Combien coûte le recours à des firmes privées parce que le gouvernement n’a pas l’expertise nécessaire à l’interne?

Et là, je ne parle même pas des coûts indirects mais qui vont rebondir sur les services de l’État. Quand, par exemple, un jeune a besoin d’accompagnement à son école mais qu’il manque de psychoéducateur, de travailleuse sociale ou de sexologue. Le phénomène des portes tournantes en santé mentale. Les délais dans le système de justice. Le manque de fonctionnaires pour traiter les dossiers. Etc.

Bref, le gouvernement n’avait pas besoin de mettre la négociation en cours dans sa mise à jour économique. C’est un exercice politique. Une tentative de plus pour décourager la mobilisation actuelle. Une façon d’influencer l’opinion publique.

Comme le reste d’ailleurs. Cette mise à jour répond à certaines des plus fortes critiques des deniers mois : le logement, les changements climatiques, les villes, l’itinérance.

Avec cette mise à jour économique, le gouvernement a voulu répondre à celles et ceux qui disent qu’il ne fait rien ou n’en fait pas assez.

Faire un chèque – ou mettre des chiffres dans une colonne d’un budget – c’est plutôt facile. Régler les problèmes, après, est plus difficile. C’est là-dessus qu’on évalue réellement un gouvernement, pas sur ses budgets.

Pour réagir à cette chronique, écrivez-nous à opinions@latribune.qc.ca. Certaines réponses pourraient être publiées dans notre section Opinions.

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